[MATP] – J’entre dans le combat par le plus grand des portails

Dès le lendemain matin, le Général Popov se présenta de lui-même dans les bureaux du Grand Nicolas. Il savait, pour avoir lui-même bénéficié de cette mesure d’urgence, ce qu’il était advenu du précédent DGS, et qu’il aurait beau chercher à formuler une excuse à ce qui allait être estimé comme la marque d’une faiblesse inacceptable, il serait remercié sur le champ et bientôt remplacé s’il n’apportait pas lui-même la formulation qui le sauverait. Il avait eu toute une nuit pour réfléchir au moyen d’échapper au pire, et sa décision était prise. Il allait faire vibrer la fibre émotionnelle, pleurant de ne se sentir être qu’un déraciné qui aurait espéré retrouver les paysages de son pays dans la grandeur de sa fonction. Il se l’était avoué sans honte : sur l’aspect fondamental qu’il était censé manipuler, il avait échoué, mais il ne serait pas encore celui qu’on allait sacrifier.

Depuis quelques mois qu’il avait été nommé Super Directeur, il avait goûté de près à l’administration que le Grand Nicolas avait développée et dont il était, en quelque sorte, le dernier échelon avant que l’on soit plongé dans la masse salariale informe et revendicative. Il avait appris qu’en ne s’opposant à rien de ce qui était proposé, il était plus simple, ensuite, d’être porteur d’une requête quelconque, surtout si celle-ci ne dépassait pas outrageusement la ligne budgétaire qui lui était allouée. Alors, la plupart du temps, il ne disait rien qui puisse rappeler son existence à ses supérieurs, à part, bien sûr, un salut bien placé avant ou après une réunion de service. Lui qui avait connu des administrations bien plus autoritaires, il avait l’impression d’être dans un club de vacances, même si, — et c’est sans doute ce qui avait permis qu’on lui confiât cette mission —, il avait bien flairé qu’ici, on souhaitait en finir avec ces idées jugées dépassées de toujours vouloir tout rendre égalitaire et démocratique. Le Grand Nicolas lui avait clairement dit qu’il attendait d’un chef de service qu’il ne se laisse pas faire et qu’il sache imposer une vision nouvelle de l’administration comme étant la seule à décider, et, de fait, la seule à régner. Le Général Popov s’était donc aisément saisi de l’opportunité de se placer bien au-dessus de ses compétences, pensant qu’il viendrait vite à bout des graines de révolutionnaires qui partout laissaient de mauvaises herbes s’incruster sur le territoire qu’on lui avait confié. Il savait, aussi, qu’il saurait réagir dès qu’il sentirait que le vent tournerait en sa défaveur. C’était le moment où jamais.

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